Mohamed Yattara : "A moi de mettre tout le monde d'accord"

ENTRETIEN - Bafétimbi Gomis et Jimmy Briand partis, Jean-Michel Aulas a fait un pari : celui de la jeunesse, avec un produit du cru, Mohamed Yattara. Un attaquant formé à Lyon, au style proche de Djibril Cissé : une technique élémentaire et des qualités physiques remarquables. Mais cet homme de 21 ans se démarque surtout par une volonté très forte de réussir. Le jeune aux cheveux peroxydés s’est confié en août dernier sans détour, à Lyon Capitale (mensuel daté de septembre 2014). Il affiche ses ambitions d’une voix posée, calme.

Vous arrivez à 15 ans à Périgueux, en provenance de Guinée, d’abord chez votre cousin puis dans un foyer pour mineurs. Comment s’est passée votre arrivée ?

Mohamed Yattara : J’ai joué avec le club du coin. Cela s’est bien passé. Mais mon cousin n’avait pas assez de revenus pour me faire vivre, et l’école m’a placé dans un foyer pour mineurs. C’était difficile. J’arrive, je suis le seul Africain... J’étais perdu. J’étais souvent seul dans ma chambre à écouter de la musique. J’étais dépaysé mais, au fur et à mesure, je me suis adapté à la vie européenne.

Comment atterrissez-vous à l’OL ?

Mon frère connaissait un agent qui connais- sait bien Fleury Di Nallo [un des plus grands joueurs de l’histoire du club, devenu son agent, NdlR]. Fleury m’a organisé un test d’une semaine. Mon éducatrice à l’école est venue me dire que j’allais faire des essais à l’OL. Elle m’a emmené acheter des protège-tibias parce que je n’avais que des crampons (rires). Tout s’est bien passé. Déjà, à l’époque, j’ai joué aux côtés de Jordan Ferri et Samuel Umtiti, qui sont aujourd’hui mes coéquipiers. J’ai fini ma scolarité et les dirigeants lyonnais m’ont rappelé pour signer mon contrat aspirant de deux ans. J’avais 16 ans.

Vous vivez alors au centre de formation de l’OL. Comment s’est passée votre adaptation ?

J’ai fait une bonne première saison. Mais cela n’a pas été facile. Avant, je faisais deux séances d’entraînement par semaine. Ici, je passe à sept ! Avec les U17, j’ai fait un malaise au centre avant le deuxième match de championnat. Je suis tombé par terre, j’ai fait tomber mon assiette et tous les verres. Ils avaient tous peur, ils ont cru que j’avais la grippe. Je reviens la semaine d’après et je marque contre Clermont. C’est là que tout a commencé.

Vous cartonnez avec les jeunes, mais vous ne passez pas le cap avec les professionnels. Comment l’expliquez- vous ?

J’ai tout de suite été surclassé avec la réserve. Mais, après, j’ai eu des soucis avec mes adducteurs. Quand je suis revenu, tout a bien fonctionné et je marque le but de la victoire au Mans et on est champions de France des réserves. Par la suite, l’entraîneur change et je ne joue pas assez. Donc je demande à être prêté.

Vous êtes prêté à Arles-Avignon (Ligue 2) puis à Troyes (Ligue 1) et enfin à Angers (Ligue 2) l’an passé. Qu’avez-vous appris de ces différentes expériences ?

J’ai pris un risque en partant d’abord à Arles-Avignon. Personne ne me connaissait là-bas. Je me suis donné à fond et, à l’arrivée, je marque cinq buts et on se maintient. J’étais content. Quand je reviens à Lyon, on ne me fait pas confiance. Mais derrière je pars en prêt à Troyes, un club qui monte en Ligue 1. La première partie de saison a été compliquée et on s’est réveillés trop tard. Je marque quatre buts et je joue presque 30 matchs, toutes compétitions confondues. De retour à l’OL, je décide encore d’être prêté car on me fait comprendre que je vais encore jouer avec la réserve. Avoir 20 ans et jouer en CFA, c’était une perte pour moi.

Vous débarquez à Angers, où vous marquez 15 buts toutes compétitions confondues...

Humainement, cela a été une superbe aventure. On m’a donné beaucoup de responsabilités sur le terrain. J’ai joué souvent, je me suis montré davantage. Malgré mon jeune âge, j’ai joué un grand rôle. J’ai engrangé beaucoup de confiance.

Hubert Fournier succède à Rémi Garde. Et, enfin, on vous fait confiance. Avez- vous douté ?

Non, car l’entraîneur me connaissait. J’avais joué contre lui avec Arles-Avignon, quand il était à Reims, et j’avais marqué. Il me connaît bien. Il m’a dit qu’il allait me donner ma chance et que c’était à moi de la saisir. Cela m’a donné de la motivation. Je me suis dit : “C’est maintenant ou jamais !” C’est à moi de mettre tout le monde d’accord.

Bafétimbi Gomis parti à Swansea (en fin de contrat), vous devez assurer la relève.

C’est un gros héritage. C’était le meilleur buteur français en activité en Ligue 1. C’est une grande responsabilité, mais je ne vais pas me mettre trop de pression. Je ne suis pas là pour le remplacer.

Quels sont vos atouts ?

J’aime bien le jeu direct. Je suis assez rapide, donc j’aime bien prendre la profondeur, occuper les espaces. Je ne calcule pas mes efforts. Je n’hésite pas à aller au charbon. Il faut déplacer les défenseurs, leur poser des problèmes dans leur dos. Mais je dois améliorer mon jeu dos au but. Je ne vais pas me le cacher. Il faut que je demande plus le ballon dans les pieds, même si ce n’est pas ce que je préfère.

La jeunesse de l’équipe est-elle une force, ou une faiblesse ?

C’est clairement un point fort. On est quasiment tous formés au club, on se connaît depuis tout petits. On est les mieux placés pour savoir qu’on se doit d’être au niveau par rapport aux autres équipes qui ont marqué l’histoire du club. C’est une chance. Il faut qu’on donne raison à tout le monde de nous avoir fait confiance. Certains médias pensent qu’on va se trouer cette saison, il faut leur donner tort. À 21 ans, on n’est plus jeune, pour moi ! Ce n’est pas une excuse.

Quelles sont vos relations avec les anciens du groupe, comme Steed Malbranque ?

On se comprend tous, car l’équipe joue ensemble depuis pas mal de temps. Il y a beaucoup de cohésion entre les jeunes et les vieux, si on peut dire (rires). C’est déjà une bonne chose. Ils sont là pour nous encadrer. Certains font un ou deux matchs et ils se croient déjà arrivés. Il faut toujours se remettre en question. Tout ce qui brille n’est pas de l’or. Les anciens sont là pour nous le rappeler.

Votre parcours vous permet-il d’éviter ce genre de reproches ?

C’est vrai qu’on n’a pas tous eu la même enfance. Cela compte beaucoup. Certains ont eu une enfance difficile, d’autres non. Nous, les Africains, on sait peut-être plus que d’autres d’où on vient et où on veut aller. On nous apprend à travailler dur. On ne veut pas prendre la grosse tête. Rien n’est acquis. Il faut se donner à fond pour ne pas avoir de regrets.

Quel est l’objectif du club cette saison ?

On ne va pas se mentir : on doit être européens. Cela fait des années que le club joue la coupe d’Europe. Ce n’est pas à nous de gâcher cette histoire, même si on est un peu dans le dur en ce début de saison. Comme on dit, ce n’est pas le début qui compte mais l’arrivée.

L’OL est-il moins fort que les autres saisons ?

C’est vrai que le club a beaucoup changé. On fait confiance aux jeunes et des nouvelles recrues sont arrivées [Christophe Jallet du PSG et Lindsay Rose de Valenciennes]. Un nouveau projet se met en place. Il ne faut pas nous juger maintenant, et nous laisser du temps.

Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez inscrit votre premier but en professionnel avec l’OL, face à Mladá Boleslav (4-1) ?

Cela fait beaucoup de bien et cela me donne de la confiance. J’attendais de marquer depuis le début de la saison. Maintenant, il faut que je débloque mon compteur en championnat. Et, le jour où je marquerai mon premier but à Gerland, je ne serai plus le même joueur.

Crédit photo : Lyon Capitale / Fabrice Catérini

7 commentaires
  1. OL48
    OL48 - mar 14 Oct 14 à 19 h 40

    Excellente mentalité pour quelqu'un qui n'a pas joué depuis quelques matchs et qui doit piaffer d'impatience.
    J'espère qu'on va le revoir rapidement sur le terrain pour juger ses progrès, maintenant que l'équipe est homogène et équilibrée.

  2. Avatar
    OL-38 - mar 14 Oct 14 à 21 h 47

    Bonsoir à tous,
    Super interview de Yattara, on le sent motivé et qu'il à envie de bien jouer et de faire ses preuves. Bon état d'esprit e bonne mentalité.

  3. Avatar
    OL-38 - mar 14 Oct 14 à 21 h 58

    Demain les Filles de L'OL jouent leurs match retour demain contre Brescia à Gerland, à 19h00. voici groupe lyonnaise:
    Gardiennes : Bouhaddi, Gerard
    Défenseures : Renard, Kumagai, Petit, Perisset
    Milieux : Henry, Bussaglia, Traore, Necib, Abily, Dickenmann, Majri, Pingeon
    Attaquantes : Schelin, Hegerberg, Le Sommer, Thomis
    ALLEZ LES FILLES DE L'OL

  4. Avatar
    OL-38 - mar 14 Oct 14 à 23 h 20

    Espérons que Yattara feras de beau et bon match et qu'il marqueras beaucoup avec L'OL, tout en gardant une bonne mentalité et ses pieds sur terre. Espérons que Les filles de L'OL ferons un bon match demain. Allez bonne soirée et bonne nuit à tous. ALLEZ L'OL

  5. Altheos
    Altheos - mer 15 Oct 14 à 14 h 14

    L'interview date de la fin Aout. Pas sûr que le discours serait actuellement tout à fait le même. Car il doit clairement ronger son frein.

  6. Avatar
    OL-38 - mer 15 Oct 14 à 21 h 28

    Bonsoir à tous,
    Les FILLES DE L'OL ont gagnés 9-0:
    Buts : pour l'OL, Le Sommer (14', 20', 47'), Necib (30'), Abily (32', 52', 73'), Hegerberg (45'), Schelin (69').
    Bravo LES FILLES DE L'OL

  7. Avatar
    OL-38 - mer 15 Oct 14 à 22 h 51

    Allez sur cette belle victoire et qualification des Filles de L'OL, Bonne soirée et bonne nuit à tous. ALLEZ L'OL

Les commentaires sont fermés

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